Prainha do Canto Verde (Ceara – Brésil)
Résumé :
Sur le littoral du Nord-Est du Brésil, une communauté de pêcheurs artisanaux fait une incursion dans le domaine du tourisme communautaire.
1. Identité de la fiche
Nom: Prainha do Canto Verde
Nom synthétique: A Prainha
Structure juridique: Coopérative informelle (entre 2000 et 2009); Conseil de Tourisme (organisation de terrain communautaire)
Etat: Actif
Date de création: 1994
Nombre de salariés: n/a
Nombre de volontaires: n/a
Site web: prainhadocantoverde.org/
Organisations ou réseaux auxquels elle appartient: Réseau de Tourisme Communautaire du Céara (TUCUM, dont le siège est à Fortaleza, tucum.org/)
2. Domaine d’activité
Portée : Locale
Contexte : Rural
3. Description
Les débuts: problématique et création
Vers le milieu des années 90, les poissons se faisaient de plus en plus rares, les prix de la terre augmentaient en raison de la spéculation immobilière et la menace du tourisme de masse se faisait plus concrète. En réponse à cette situation, en 1994, la communauté décide de s’organiser pour chercher des façons de protéger son territoire et améliorer la qualité de vie. Ils créent un conseil du tourisme, entre autres, qui, après une étape de recherche, en arrive à une conclusion accablante : les petits entrepreneurs de tourisme n’étaient pas les propriétaires de la terre et n’avaient de plus aucune perspective de croissance.
Antonio Aires, pêcheur de la communauté et l’un des leaders de l’entreprise, explique comment s’est concrétisée l’initiative : en 1998 se constitue le Conseil de Tourisme Communautaire (avec plus de 100 membres), qui depuis 2000 et jusqu’à 2009 a fonctionné en tant que coopérative informelle. Le Conseil adhère aux valeurs du « tourisme communautaire et durable » et c’est ainsi qu’est née la première expérience de tourisme communautaire du littoral brésilien, parvenant à vaincre le scepticisme initial de certains membres de la communauté.
Le concept: idées, innovation, technologíe sociale
Le tourisme communautaire de la Prainha se base principalement sur la redistribution des revenus et la préservation de la culture et de l’environnement naturel de la zone. Ainsi, les produits et services proposés au touriste proviennent des membres même de la communauté (denrées alimentaires, artisanat, guides touristiques) et il n’existe pas d’esprit de concurrence entre les posadas. C’est un type de tourisme qui, selon Antonio, doit continuer à ne représenter qu’une source de revenus complémentaire – il représente actuellement environ 15% – qui permet d’améliorer la qualité de vie des habitants de la communauté, mais sans mettre en danger leurs traditions culturelles ni détruire l’environnement. Ils n’ont clairement pas l’intention d’abandonner la pêche artisanale pour se dédier aux touristes, ils ne sont pas non plus disposés à transformer leur culture et leurs traditions pour satisfaire un éventuel tourisme de masse.
Dans la suite logique de ces idées, ils ont fondé en 2008 le Réseau de Tourisme Communautaire du Céara (TUCUM), avec d’autres communautés organisées. Aujourd’hui font partie du réseau 11 communautés du littoral et deux associations à Fortaleza (une association de femmes et une autre du MST ), avec pour objectifs principaux plus de diffusion et de reconnaissance du tourisme communautaire et l’élaboration de stratégies pour générer plus de conscience politique dans les communautés – en particulier en relation avec les violations systématiques de leurs droits.
Evolution: problèmes affrontés et solutions mises en oeuvre
Problème: Formaliser est très compliqué et bureaucratique. Solution: Renforcement du réseau Tucum et appui d’organisations amies, en particulier de l’Institut Terramar (www.terramar.org.br/).
Problème: Menace de la part des grands propriétaires terriens qui en appellent à des instances judiciaires, “grelhagem” (une personne dit qu’elle est propriétaire de la terre). Solution: Le tourisme a renforcé l’organisation communautaire et s’est converti en une source complémentaire de revenus. Par décret présidentiel, le 5 juin 2009, la zone a été déclarée « réserve d’extraction », créant une zone protégée d’environ 3000 hectares dans laquelle il est interdit de mettre en œuvre des mégaprojets ou des activités industrielles qui mettent en danger la survie et le bien-être des populations qui y vivent.
Problème: Dans la communauté, ils n’avaient jamais reçu d’inconnus qui venaient chez eux en tant qu’hôtes. Solution: Avec le temps, ils se sont habitués et aujourd’hui, cela leur semble une activité enrichissante.
Problème: Pêche prédatoire et illégale, manque de contrôle (fiscalizaçao), présence de pêcheurs qui n’appartiennent pas à la communauté. Solution: Pas encore trouvée.
Objectifs
Se protéger des effets nocifs du tourisme de masse.
Contrôler la spéculation immobilière.
Créer une source complémentaire de revenus pour améliorer la qualité de vie.
Renforcer l’organisation communautaire et revendiquer l’héritage culturel et la terre.
Protéger les écosystèmes et la biodiversité de la zone.
Activités:
Principale: Pêche artisanale (langouste)
Secondaires: Tourisme; Elevage; Agriculture; Artisanat
Bénéficiaires / Clients
Bénéficiaires:
Propriétaires des posadas.
Fournisseurs de biens et services, les agriculteurs, les pêcheurs, les artisans, les guides touristiques, etc.
La communauté en général: Nette amélioration de la qualité de vie. Aujourd’hui, les membres de la communauté sont plus conscients de leurs droits et de comment les défendre.
Clients:
Touristes responsables (la moitié est étrangère).
Bailleurs
Initiative communautaire autofinancée.
Autres acteurs impliqués
Association des habitants de Prainha do Canto Verde, Institut Terramar, Réseau Turisol, Mouvement des Travailleurs Ruraux sans Terre (MST)
Autosuffisance et autogestion
La majorité des petites entreprises touristiques sont autosuffisantes. Cependant, le réseau ne possède pas encore de système de réserves et de gestion propre (pour le moment ils se reposent sur l’Institut Terramar pour la gestion).
4. Analyse
Résultats obtenus
Avec la création du réseau d’entrepreneurs solidaires, ils ont accès à plus de formations et la quantité de touristes à la Prainha est en augmentation, ils ont plus de visibilité et créent des liens avec des groupes d’étudiants en tourisme et environnement, qui viennent vérifier que le tourisme communautaire, ça fonctionne.
Ils ont gagné le prix TO DO!99 (Contest Socially Responsible Tourism).
En 2008 le Gouvernement brésilien reconnaît le tourisme communautaire comme outil d’éradication de la pauvreté.
Ils ont réussi à ce que le Gouvernement déclare la zone “réserve d’extraction”.
Analyse SWOT
Faiblesses: Logistique; infrastructure parfois insuffisante; manque de formation en marketing, comptabilité et gestion touristique.
Opportunités: C’est une zone avec beaucoup d’attraits pour le tourisme (nature, climat, plages, gastronomie, culture, etc); Coupe du Monde en 2014 et Jeux Olympiques en 2016 (cela peut aussi représenter des menaces); croissance de la demande d’écotourisme responsable.
Forces: Les touristes reviennent; écosystèmes bien conservés; gastronomie excellente; appui important des organisations amies; la communauté est organisée.
Menaces: Tourisme de masse; spéculation immobilière; déstabilisation externe.
Soutenabilité
Economique: Le tourisme apporte des revenus complémentaires pour la communauté. Le service proposé est de qualité et à un prix équitable, qui garantit la viabilité financière. Sur le long terme, il est à espérer que la communauté puisse gérer elle-même toute la chaîne de prestation de services.
Sociale: Le revenu est redistribué et apporte des bénéfices directs à la majorité des membres de la communauté. La qualité de vie s’est améliorée et les personnes sont plus conscientes de leurs droits. Cependant, le tourisme ne représente pas encore une option viable pour les jeunes de la communauté qui continuent à migrer vers les villes.
Environnementale: Grâce aux efforts de la communauté, la zone est aujourd’hui protégée par la loi. Toutes les activités touristiques se développent dans le respect et la protection de l’environnement. La plupart des aliments proviennent de l’agriculture paysanne.
Culturelle: Le tourisme revendique la culture de la communauté et permet de conserver des traditions telles que la pêche artisanale et l’élaboration d’artisanat, sous la forme de commerce équitable.
Reproduction de bonnes pratiques et transfert de technologies sociales
Le modèle de la Prainha peut se dupliquer facilement dans n’importe quelle autre communauté possédant un potentiel touristique moyen ou élevé. C’est une protection effective contre les effets nocifs du tourisme de masse, comme par exemple, la spéculation immobilière, la destruction de l’environnement et l’exploitation des travailleurs.
La création de réseaux de communautés, d’opérateurs de tourisme communautaire et de réseaux nationaux renforce ces processus. L’appui d’institutions amies (ONGs, mouvements sociaux) est indispensable. Les efforts doivent se concentrer sur la création de ligne d’actions, de manuels ou d’ateliers de formations/appui pour :
a) Renforcer les organisations et améliorer le service des communautés qui opèrent déjà dans le domaine du tourisme.
b) Créer des structures d’appui ou appuyer directement les communautés qui cherchent à démarrer leur propre entreprise solidaire touristique.
c) Que le tourisme communautaire acquière de la visibilité au niveau national et continental, comme la somme de nombreux processus locaux qui communiquent entre eux et qui suivent les mêmes lignes et principes.
Note: Vous pouvez télécharger la fiche technique complète en fichier attaché.
Vidéo en portugais
Sources :
Pangea sostenible/Sustainable Pangea pangeasostenible.org/